La dépression est un état de souffrance psychique, plusieurs théories peuvent expliquer le mécanisme de la dépression :
Théorie Noradrénergique : déficit en Noradrénaline (NA), l’antidépresseur aurait une activité d’agoniste direct β-postsynaptique sur les récepteurs noradrénergiques.
Théorie Sérotoninergique : améliorer l’humeur due à la diminution de l’activité sérotoninergique par administration de précurseur de la sérotonine (tryptophane).
Théorie Dopaminergique : déficit en Dopamine (DA) l’antidépresseur aurait un effet agoniste de la dopamine sur les récepteurs dopaminergiques.
Sommaire
Mécanisme d’action des antidépresseurs et classification
De point de vue pharmacologique, la dépression est une diminution de la neurotransmission aminergique (Noradrénaline(NA), Sérotonine (5HT)) entrainant une down-régulation des récepteurs β-adrénergiques, Elle implique aussi : le système cholinergique, GABA, DOPA, récepteur N-méthyl-D-aspartate (NDMA).
L’antidépresseur augmente la concentration synaptique de ces neurotransmetteurs.
Figure 1. Mécanisme d’action des antidépresseurs
Antidépresseurs à effet stabilisant de membrane
Antidépresseur tricyclique ou imipraminique
Ils dérivent du noyau iminodibenzyle (ex : imipramine). L’amine secondaire ou tertiaire de la chaîne latérale conditionne partiellement le type d’activité biochimique ainsi que la cinétique.
Dibenzoazépine : imipramine.
Déhydrobenzoazépine : opipramol.
Dibenzocyclohéptadiène : amitriptyline.
Dibenzodiazépine : dibenzépine.
Dibenzoxépine : doxépine.
Toxicocinétique
L’absorption digestive est lente et prolongée pour 02 raisons : Bases faibles ionisées dans la cavité gastrique, et leur action anticholinergique qui induit un ralentissement du péristaltisme intestinal.
Les Antidépresseurs tricyclique possèdent une grande affinité tissulaire, le volume de distribution Vd = 10-30 l/kg.
Métabolisme essentiellement hépatique quantitativement important (1er passage hépatique)
- Phase I : l’imipramine subit une oxydation et une hydroxylation du noyau sur le carbone C2 ou C10 par le cytochrome P450 puis une dégradation progressive de la chaine latérale et une N- déméthylation, et une N-oxydation. A la fin des réactions, une désipramine pharmacologiquement active est produite, et subira par la suite le cycle entérohépatique (CEH).
- Phase II : Glucuronoconjugaison des métabolites hydroxylés.
Elimination
Les dérivés métabolisés éliminés par la bile rejoignent obligatoirement le cycle entérohépatique car possèdent une très grande affinité pour les tissus.
Mécanisme d’action toxique
Les neuromédiateurs après synthèse et libération dans la fente synaptique se fixent sur les récepteurs postsynaptiques induisant une transmission amino-ergique. Ils sont par la suite dégradés par la MAO ou par la COMT et recaptés par le neurone présynaptique.
Les antidépresseurs sont des inhibiteurs non sélectifs de la recapture de la monoamine (NA, DA, ST), augmentant ainsi la stimulation adrénergique et sérotoninergique jusqu’à l’exacerbation responsable d’euphorie et d’anxiété.
Les antidépresseurs ont aussi un effet anticholinergique central et périphérique, et adrénolytiques à l’origine de l’hypotension orthostatique
Les antidépresseurs ont aussi un effet antihistaminique à l’origine de l’effet sédatif, voire hypnotique.
Figure 2. Mécanisme d’action des AD tricycliques
Toxicité
Toxicité aiguë
Les doses toxiques pour l’imipramine : 500 mg pour l’adulte 5 mg/kg pour l’enfant
Les intoxications aiguës à l’imipramine sont caractérisées par un temps de latence d’apparition (phase trompeuse) qui dure de 1-4 heures, 03 syndromes majeurs sont constatés à savoir:
- Syndrome sérotoninergique.
- Syndrome anticholinergique.
- Syndrome d’effet stabilisant de membrane.
Les signes cliniques d’une intoxication aiguë sont :
Neurologiques : syndrome pyramidal, agitation, convulsions, coma profond, et une dépression respiratoire modérée.
Syndrome anticholinergique : persiste plusieurs jours : mydriase, sécheresse buccale, tachycardie, constipation.
Manifestations cardiovasculaires : troubles de conduction intra-ventriculaire qui peuvent persister jusqu’au 5ème jour ce qui nécessite un suivi d’au moins 1 semaine.
Traitement des intoxications:
Traitement évacuateur : Décontamination digestive : LG répétée par du charbon activé
Traitement symptomatique :
- Monitoring : surveillance clinique et ECG continu.
- Intubation pour ventilation mécanique en cas de coma, hypoxie.
- Administration du Diazépam IV et ventilation assistée en cas de convulsions.
- Remplissage vasculaire pour l’hypotension.
- Administration d’anti-arythmique en cas d’arythmie et de l’adrénaline en cas d’arrêt cardiaque.
Traitement spécifique :
- Lactate ou bicarbonate de Na
- Sérothérapie: fragments Fab d’anticorps monoclonaux anti-ANTIDEPRESSEUR à l’étude.
Antidépresseur tétracycliques : maprotiline
Les antidépresseurs tétracycliques tiennent leur nom de leur structure chimique qui contient quatre cycles. Ils sont relativement proches des tricycliques, et possèdent une toxicité similaire à ces derniers.
En raison de sa structure tétracyclique ils ne sont pas détectée par les méthodes immunologiques et donnent une réaction faussement négative avec les tricycliques.
Antidépresseurs sans effet stabilisant de membrane
Inhibiteurs de la monoamine oxydase (IMAO) :
La MAO (Mono Amine Oxydase) est une enzyme intracellulaire, fixée sur la membrane des mitochondries, retrouvée au niveau du SN, foie et de l’épithélium intestinal.
On distingue deux iso-enzymes :
MAO-A : substrat préférentiel : NA, 5HT.
MAO-B : substrat préférentiel : Dopamine.
Classification et mode d’action
IMAO non sélectifs : Iproniazide non spécifiques, à action irréversible, bloquent à la fois MAO-A et MAO-B. (Efficacité comparable à celle des antidépresseurs), et inhibe la dégradation des monoamines cérébrales :
- Indolamines (tryptamine et sérotonine),
- Catécholamines (dopamine, noradrénaline, adrénaline).
Les IMAO non sélectifs possèdent des groupements réactifs sur la structure de la phényléthylamine qui vont se fixer de façon covalente sur l’enzyme et entrainer une inhibition non compétitive, irréversible et durable. (Arrêt préconisé de 15 jours avant un nouveau traitement antidépresseur).
Figure 3. Inhibiteur de la MAO
IMAO sélectifs :
- IMAO-A sélectif: Méclobémide
- IMAO-B sélectif : Toloxatone.
Le Méclobémide inhibe préférentiellement et réversiblement la monoamine oxydase (MAO) de type A ce qui entraine une augmentation de la concentration des médiateurs mono-aminergiques cérébraux et une diminution du catabolisme de la noradrénaline, de la sérotonine et, à moindre degré, de la dopamine pendant 14 à 16 heures.
Toxicocinétique du Méclobémide
Intoxication
IAMO non sélectif : Iproniazide
Bénigne si malade a gardé un décubitus strict pour prévenir le risque d’hypotension. Le pronostic vital est engagé si la dose ingérée est à 1.5 à 2.5 g.
Symptômes : mydriase, tachycardie, hallucination, agitation pouvant évoluer rapidement vers coma et convulsions.
Mortalité : 33% cas.
IMAO sélectif : méclobémide
Généralement : bon pronostic.
Symptomes : idem IMAO non sélectifs.
Les intoxications mixtes (IMAO + Antidépresseur) sont dramatiques avec les signes cliniques suivants : convulsions, hyperthermie, hypertension paroxystique, troubles de la conduction évoluant potentiellement vers la mort.
Traitement
Traitement évacuateur : évacuation digestive
Traitement symptomatique : assistance respiratoire, hyperthermie maligne et spasticité musculaire : dantrolène.
Sels de lithium
Les sels de lithium constituent un traitement thymorégulateur, utilisé notamment dans le trouble bipolaire. Les doses administrées de lithémie sont : 0.6-0.8 mmol/l.
L’intoxication aux sels de lithium surgit lors d’une prise d’une dose massive chez un sujet non traité, ou préalablement traité, ou bien en cas de surdosage chronique à cause d’une pathologie chronique (insuffisance rénale), où les sels de lithium ne sont pas métabolisés et éliminés par les reins.
Signes cliniques:
- Tremblements des extrémités +++
- Maladresse lors de la manipulation des objets, modification de l’écriture.
Si aucun diagnostic n’est posé à ce stade les symptômes évoluent vers des troubles de consciences, convulsions, hypertonies voire coma.
Toxicocinétique: pas de liaison aux protéines plasmatiques
Il n’existe pas de corrélation entre la sévérité de l’intoxication et les taux plasmatiques.
Traitement
Traitement évacuateur : lavage gastrique par du charbon activé.
Traitement symptomatique : intubation et ventilation assistée.
Inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine
ISRS
Toxicocinétique – fluoxétine
L’absorption est ralentie par l’alimentation, le métabolisme est principalement hépatique (bioactivation), la Fluoxétine et Paroxétine inhibent leurs propres métabolisme. L’élimination est rénale faible sous forme inchangée.
Mécanisme d’action
Figure 4. Mécanisme d’action des ISRS
Durant la première phase de traitement (15 premiers jours), l’inhibition de la recapture de la sérotonine entraine une accumulation de cette dernière dans la fente synaptique, la concentration seuil est atteinte, et le neurone sérotoninergique libère moins de sérotonine suite à la stimulation d’un autorécepteur (Feed-back (-)).
Durant la seconde période du traitement, l’exacerbation des stimuli des autorécepteurs entraine une désensibilisation de ces derniers, il faudra donc des concentrations beaucoup plus importantes pour le stimuler. Il en résulte une réémission des potentiels d’action par les neurones sérotoninergiques, et une libération de novo de la sérotonine au niveau des terminaisons axoniques.
La sérotonine n’étant pas recaptée, sa concentration cellulaire augmente et la transmission sérotoninergique est facilitée.
Clinique de l’intoxication aiguë :
Syndrome sérotoninergique : agitation, tremblements, hyperthermie, myoclonies, troubles conscience, tachycardie.
Traitement
Traitement évacuateur : évacuation digestive.
Traitement symptomatique : correction hyperthermie par refroidissement externe.
Antidépresseurs à action duale : IRSNa
Toxicocinétique
Minalcipran: inhibiteur double de la recapture de la sérotonine et la Noradrénaline.
Ils sont Dépourvus d’affinité pour les récepteurs muscariniques, les récepteurs α-adrénergiques et les récepteurs histaminergiques Hl (distinction par rapport aux imipraminiques)
Venlafaxine: c’est un antidépresseur bicyclique inhibiteur de la recapture de la sérotonnine, noradrénaline; DOPA. Il est fortement métabolisé en o- desméthylvenlafaxine. Le t ½ d’élimination est de 2-4 jours.
Toxicologie analytique
Dépistage
Milieux biologiques : sang, urines, liquide de lavage gastrique.
Isolement : extraction alcaline par solvant (éther, dichlorométhane)
Identification
Réaction colorées : réaction de Marquis : l’amitriptyline + acide sulfurique+ formaldéhyde donne une fluorescence jaune sous UV.
CCM : la révélation par phosphocérique donne une coloration bleue.
Immunoenzymologie (EMIT enzyme multiplied immunoassay) et Immunofluorescence.
CGP à ionisation flamme (CPG FID)
HPLC à barrettes de diodes (HPLC DAD)
Dosage du produit inchangé et métabolites (formes libres et conjuguées par CPG, HPLC)