Le terme toxicologie provient du Grec : ‘τοξικόν’ (toxicon) qui signifie ‘poison’. L’utilisation de flèches empoisonnées représente la première utilisation intentionnée de substances toxiques. Bien que les effets de certains poisons fussent connus par les Grecs et les Romains et que leurs emplois à des fins criminelles aient été poursuivis au cours du moyen âge et de la renaissance, ce n’est qu’au début du XVIIIème siècle et principalement au XIXème siècle que la toxicologie devient réellement une discipline scientifique. La toxicologie est une science multidisciplinaire. Elle est à l’interface entre plusieurs disciplines : chimie, physiopathologie, pharmacocinétique, pharmacologie, médecine, etc. Et implique l’étude des effets nocifs des agents physiques et chimiques sur les organismes vivants. La toxicologie s’intéresse d’abord à l’origine (étiologie) des toxiques et des intoxications, aux facteurs qui influencent leur toxicité à savoir les propriétés physicochimiques, la posologie, la voie d’exposition, la notion d’espèce, l’âge, le sexe et l’environnement. Ensuite à la cinétique desdits toxiques (Toxicocinétique) dans l’organisme (administration, distribution, métabolisme, élimination). Puis aux effets néfastes engendrés sur un organisme ou un ensemble d’organismes vivants cibles ou encore sur l’environnement (écotoxicologie), en passant par l’étude des mécanismes de toxicité impliqués, le diagnostic, les moyens pour combattre (traitement), les moyens de détection (qualitative, et quantitative), les méthodes de prévention. Et enfin à la surveillance médicale (Toxicovigilance).

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Histoire

Figure 1. Copie anonyme du xviie siècle d’un portrait présumé de Paracelse (1493-1541)

Figure 1. Copie anonyme du xviie siècle d’un portrait présumé de Paracelse (1493-1541)

Paracelse, photographié ici, était un médecin philosophe, mais aussi théologien laïque suisse du XVIe siècle, il est considéré comme le « père de la toxicologie ». Certaines de ses observations telles que la thérapie de la syphilis à base du mercure, qui, mal dosé, tue, ont fait de lui un précurseur de la toxicologie moderne, car on sait aujourd’hui, grâce à sa théorie que c’est « dans la dose qu’est le poison », autrement, des substances réputées toxiques peuvent être anodines voire même bénéfiques à de petites doses et inversement, une substance totalement inoffensive telle que l’eau peut s’avérer mortelle si elle est absorbée à de très grandes quantités.
La connaissance des poisons et des empoisonnements remonte à l’Antiquité. Le désir de l’humanité d’assurer sa santé et sa sécurité a toujours été présent, mais le fait de tirer des conclusions sur les produits chimiques nocifs a nécessité de l’apprentissage. Initialement, cela a été fait par des couples d’expériences (essais / erreurs) où des substances avaient été testées pour voir lesquelles étaient sûres et lesquelles étaient dangereuses. Des documents écrits datant d’environ 450 avant notre ère ont été récupérés et qui décrivent la toxicité du venin libéré dans une morsure de serpent et comment ce dernier a pu être traité. Cléopâtre (reine d’Égypte antique) s’est suicidée par une morsure auto-infligée d’un serpent, bien que ce récit largement raconté puisse être plus une fiction qu’un fait. Les Grecs et les Romains avaient également une bonne connaissance de nombreux poisons naturels. En fait, la mort par poison n’était pas une forme inhabituelle de peine capitale. Socrate, par exemple, a été condamné à boire de la pruche empoisonnée pour avoir prétendument corrompu la jeunesse d’Athènes et ne pas avoir reconnu les divinités officielles de l’État. Beaucoup de poisons ont continué au cours des siècles à être utilisés comme un moyen discret et efficace pour tuer des conjoints, des membres de la famille, et des ennemis. La toxicologie a progressé de manière significative tout au long du moyen âge grâce à une compréhension des maladies professionnelles liées aux opérations minières. Au fil du temps, les toxicologues ont étudié la toxicité d’une vaste gamme de produits chimiques, naturels et synthétiques. Plus récemment, ils ont adopté le concept de la « chimie verte » comme une approche pour identifier et développer des produits chimiques et des produits ayant des propriétés qui minimisent les impacts négatifs sur les humains et sur l’environnement. L’un des objectifs principaux de la toxicologie moderne et de s’éloigner de l’approche traditionnelle de l’expérimentation animale pour se diriger vers une voie d’expérimentation sans danger, par le développement de méthodes alternatives aux tests traditionnels qui sont aussi fiables pour déterminer la toxicité d’un agent toxique. L’ère contemporaine a embrassé la recherche dans d’autres domaines, notamment la toxicologie moléculaire, la modélisation informatique et la nanotoxicologie. Bien que de nouvelles méthodologies continuent d’être explorées, pour certains effets toxiques, il n’y a pas de substitut à l’expérimentation animale. L’utilisation de techniques physicochimiques dans l’analyse des médicaments et d’autres poisons dans des fluides ou des tissus corporels et les milieux biologiques connexes trouve ses origines dans le développement de la toxicologie médico-légale. D’importantes contributions et des travaux sont venus plus tard pour améliorer la sécurité alimentaire et la toxicologie professionnelle. Le procès de Marie Blandy à Oxford en Mars 1752 pour l’assassinat de son père est le premier usage déclaré de tests chimiques pour détecter un poison, en l’occurrence, l’arsenic, dans un procès criminel (Mitchell, 1938 ; Watson, 2004). Mathieu Orfila Joseph Bonaventure (1787-1853) à Paris, à la suite du travail du médecin Fran ¸ Emmanuel Fodéré (1764-1835) a classé les poisons en six catégories : « corrosifs, astringents, irritants, stupéfiants, narcotiques irritants et putréfiants» (Orfila, 1821), ce qui fut de lui un pionnier dans l’étude systématique du rôle de l’analyse chimique dans le diagnostic de l’empoisonnement. Ce travail a été réalisé par ses élèves, notamment Sir Robert Christison (1797-1882) à Edimbourg, Alfred Swaine Taylor (1806-1880) à l’hôpital Guy de Londres (Coley, 1998), et Jöns Jacob Berzelius (1779-1848) en Suède (Jones, 1998). Plenck (1781) avait observé que « le seul signe certain d’empoisonnement est le caractère naturel du poison organique ou de l’identification chimique du poison minéral trouvés dans le corps ». Toutefois, cela n’a pas été accepté par les toxicologues britanniques, notamment Christison, qui a jugé que la probabilité médicale, en collaboration avec la preuve générale, pourrait être si forte que le diagnostic de l’empoisonnement était incontestable. Néanmoins, compte tenu de cette mise en garde, l’importance des tests chimiques pour confirmer une suspicion d’intoxication a été claire et le lien entre la toxicologie clinique et analytique a connu un développement spectaculaire au cours des 250 dernières années. Les Méthodes chimiques sensibles et sélectives pour la détection des poisons métalliques comme l’arsenic (Marsh, 1836), l’antimoine, le bismuth et le mercure (Reinsch, 1841) dans des échantillons biologiques ont été introduites dans les années 1830. L’extraction par solvant des alcaloïdes comme la nicotine à partir d’échantillons biologiques afin de faciliter les tests chimiques ou physiologiques de détection et d’identification a été introduite par Stas dans les années 1850, et développée dans une méthode systématique pour l’extraction de composés organiques non volatils dans les fluides corporels par Otto. Des méthodes chimiques et spectroscopiques ont été élaborées à la fin du XIXe siècle pour le dosage du monoxyde de carbone et des méthodes chimiques pour le dosage de l’éthanol dans le sang ont également été développées (Niyogi, 1981). Les Progrès les plus remarquables en toxicologie chimique incluent l’introduction d’une technique colorimétrique pour la détection des barbituriques (1933) et l’utilisation de sulfate d’ammonium sur les alcaloïdes (1937). Une approche alternative pour la purification de médicaments de base à partir d’échantillons biologiques, la précipitation des protéines à l’acide trichloracétique suivie par l’adsorption sur le kaolin et l’élution subséquente des médicaments d’intérêt analytique, a été décrite en 1937, la précipitation des protéines par le tungstate de sodium a été introduite en 1946. Le Florisil, un silicate de magnésium synthétique, introduit en 1949 pour l’adsorption des médicaments de base tels que les stupéfiants à partir d’échantillons biologiques à la place du kaolin. Des méthodes de microdiffusion (Conway, 1947) ont été développées pour les analytes volatils. Des avancées majeures dans la méthodologie analytique ont suivi l’introduction et l’application de techniques physico-chimiques raffinées telles que la spectrophotométrie et la chromatographie à la fin des années 1940. En particulier, les rayons ultraviolets (UV) et infrarouges (IR) de la spectrophotométrie, la spectrophotométrie visible (colorimétrie), en plus, la chromatographie sur papier et la chromatographie sur colonne échangeuse d’ions ont été largement utilisées. Plus récemment, la Chromatographie sur papier a été remplacée par la chromatographie sur couche mince (CCM), car cette dernière technique présente des avantages de rapidité de l’analyse et des limites de détection plus basses. L’amélioration de l’instrumentation pour la spectrophotométrie UV (y compris les installations pour la spectroscopie), la spectrophotofluorimétrie, la spectrométrie d’absorption atomique, la voltampérométrie anodique inverse, l’électrochimie, la diffraction des rayons X, la spectrométrie de masse, la résonance magnétique nucléaire et de l’analyse par activation neutronique a conduit à l’élargissement des applications de ces techniques sur des cas très particuliers.

Généralités

Un toxique est tout agent physique ou chimique qui provoque des effets nocifs chez un organisme vivant. Un poison est un toxique qui agit à des doses très faibles. Un xénobiotique est toute substance chimique exogène introduite dans un organisme vivant. La toxicocinétique est l’étude du devenir d’un toxique dans l’organisme. Une intoxication est l’action produite par un toxique après pénétration dans l’organisme que ce soit à une dose élevée en une ou plusieurs fois très rapprochées ou par petites doses répétées pendant une durée de temps longue, et qui provoque immédiatement ou à terme, de façon passagère ou durable des troubles d’une ou de plusieurs fonctions de l’organisme, par exemple, la mort.

Formes d’intoxication

On distingue généralement quatre types d’intoxications selon la fréquence et la durée de l’exposition : Tableau 1.1. Formes d’intoxication.
Forme d’intoxication Fréquence d’administration Durée d’exposition
Aiguë Unique < 24 heures
Subaiguë Répétée ≤ 1 mois
Subchronique Répétée de 1 à 3 mois
Chronique Répétée > 3 mois

Domaines de la Toxicologie

On distingue plusieurs domaines individuels au sein même de de la Toxicologie, considérés parfois comme des disciplines indépendantes telles que la Toxicologie médicolégale (expertises judiciaires). Hygiène alimentaire (études des additifs, contaminants … etc.). Hygiène sociale (étude des toxicomanies et la lutte contre les addictions aux drogues). Toxicologie professionnelle (études des intoxications professionnelles dans les secteurs industriel et agricole). Écotoxicologie (étude de la pollution de l’air, des eaux, et du sol et leurs répercussions sur l’homme et les équilibres biologiques). Biotoxicologie, Toxicologie expérimentale (les essais de toxicité aiguë et chronique). Toxicologie appliquée descriptive, et la Toxicologie clinique.

Principaux types d’intoxication

  • Empoisonnement suicidaire : les substances les plus utilisées peuvent être des médicaments (psychotropes, digitaliques … etc.), le monoxyde de carbone (CO) (gaz d’échappement de voitures), des pesticides, des produits domestiques (les caustiques tels que l’eau de javel).
  • Empoisonnement criminel : les substances impliquées peuvent être des métaux tels que l’arsenic, le cuivre, ou des poisons volatils tels que les cyanures d’hydrogène.
  • Empoisonnement accidentel: induit par des erreurs (mauvais étiquetage, confusion, imprudence, inattention aux enfants). Les Exemples les plus fréquents comprennent les intoxications par les plantes, les champignons, les intoxications médicamenteuses, et les intoxications par les produits domestiques.
  • Intoxication alimentaire: induite par le produit toxique lui-même, ou bien après que ce dernier soit rendu toxique sous certaines conditions.
  • Intoxication professionnelle: exemples de toxiques responsables : les métaux tels que le plomb, le mercure, les solvants tels que le chloroforme.
  • Intoxication environnementale: due à la pollution atmosphérique et hydraulique.
Bibliographie
  • Gail Cooper; Adam Negrusz (28 May 2013). Clarke's Analytical Forensic Toxicology. Pharmaceutical Press. ISBN 978-0-85711-054-1.
  • Dietrich Schuppan; Anthony D. Dayan; Frances A. Charlesworth (14 November 2014). The Contribution of Acute Toxicity Testing to the Evaluation of Pharmaceuticals. pp. 31–32. ISBN 978-3-642-70390-4.
  • Toxicologie analytique et l’histoire » Analytical Toxicology. (2015, April 22). Page Web: https://www.analyticaltoxicology.com/toxicologie-analytique-et-lhistoire
 
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