Toxicité Aiguë

La toxicité d’une substance est sa capacité de produire des effets nocifs à un organisme vivant. Elle varie selon la dose, la fréquence, la durée d’exposition, et le temps d’apparition des signes cliniques.

Toute substance destinée à être mise sur le marché que ce soit un médicament ou autre produit chimique doit subir des essais de trois types de toxicité pour bien évaluer sa nocivité.

On distingue cliniquement trois formes essentielles de toxicité : la toxicité aiguë, la toxicité à court terme (subaiguë ou subchronique) et la toxicité à long terme (ou chronique).

La toxicité aiguë est une forme de toxicité qui résulte d’une exposition de courte durée suite à une absorption rapide du toxique par dose unique ou multiple ne dépassant pas 24 heures. Les manifestations d’intoxication se développent rapidement en général, la mort ou la guérison survient sans retard.

Sommaire

Article complet (PDF) : Toxicité aiguë

Définition

La toxicité aiguë est une forme de toxicité qui résulte d’une exposition de courte durée suite à une absorption rapide du toxique par dose unique ou multiple ne dépassant pas 24 heures. Les manifestations cliniques se développent rapidement en général, la mort ou la guérison survient sans retard.

Évaluation de la toxicité aiguë

L’évaluation de la toxicité aiguë est une étude qualitative et quantitative des phénomènes toxiques résultant d’une administration unique d’un xénobiotique. Cela comprend : (1) des études épidémiologiques qui comparent plusieurs groupes d’individus (2) des études expérimentales in vivo qui utilisent des animaux (3) des études expérimentales in vitro effectuées sur des cultures de tissus ou des cellules (4) des études théoriques par modélisation (5) des études humaines (6) des études expérimentales in vivo.

Cette évaluation a pour but d’évaluer le risque potentiel d’une nouvelle substance.

Les essais de TA (toxicité aiguë) diffèrent selon la voie d’administration de la substance à tester, on distingue :

Les essais de TA systémiques

Ces essais ont pour but de déterminer la dose minimale mortelle (DMM) qui est la dose minimale d’une substance capable de tuer un animal par administration intraveineuse lente. La mort est appréciée suite à l’arrêt cardiaque. Cette dose permet à l’expérimentateur de choisir les doses à utiliser pour la DL50. La dose létale 50 ou DL50 est un indicateur quantitatif de la toxicité d’une substance. Cet indicateur mesure la dose d’une substance qui cause la mort de 50 % d’une population animale donnée (souvent des souris ou des rats) dans des conditions d’expérimentation précises. Elle s’exprime en milligrammes de matière active par kilogramme de poids de l’animal. Plus cette valeur est petite, plus la substance est toxique.

S’il s’agit d’une substance inhalée, on parle alors de concentration létale 50 (CL50 ou CLt50) pour exprimer la concentration du toxique dans l’air inspiré qui cause la mort de 50 % des animaux. La CL50 est exprimée en mg min/m³.

Dispositif expérimental

Espèce animale : Généralement, c’est le rat et la souris qui sont les deux espèces de rongeurs les plus employées et qui sont sélectionnées pour déterminer la DL50 pour des raisons de coût (prix de revient acceptable, besoins nutritifs réduits) et de commodité (petite taille, courte durée de gestation). Parfois, une espèce autre qu’un rongeur est utilisée lorsque les schémas métaboliques chez le rat et la souris sont différents de celui de l’homme.

Voie d’administration : La substance est administrée par deux voies, une qui est celle de l’exposition humaine et l’autre qui assure une biodisponibilité totale.

Dose et constitution des lots : Une gamme de six doses ou plus est sélectionnée pour la détermination de la DL50. Les lots sont constitués de 10 animaux identiques sur les plans espèce, souches ou origine, sexe, âge, et poids. Chaque lot d’animaux reçoit une dose de la substance à tester.

Durée d’observation : Après administration, les animaux sont mis en observation pendant 14 jours. S’il y a apparition des signes de toxicité, la durée d’observation sera donc indéterminée.

Examens à faire : L’heure de la mort doit être notée ainsi que les symptômes observés, des examens macroscopiques doivent être faits sur tous les animaux morts et au moins sur les survivants (pour les animaux qui présentent des signes de morbidité). L’autopsie, quant à elle, est en mesure de fournir des informations sur l’organe cible.

Calcul de la DL50

Méthode de Trévan (1927)

Le protocole opératoire consiste en l’administration de doses croissantes du produit à examiner à tous les animaux du lot, ensuite, le pourcentage de mortalité est noté.

Le pourcentage est ainsi représenté graphiquement en fonction de la dose administrée, une courbe en sigmoïde est ainsi obtenue : c’est la courbe de Trévan.

Figure 2.2. Courbe de Trévan
Figure 2.2. Courbe de Trévan

La portion centrale de la courbe qui représente les réponses entre 16 % et 84 %, elle est suffisamment droite pour estimer la DL50 dont la détermination se fait graphiquement par extrapolation.

Inconvénients :

Une grande partie de la courbe ne peut pas être exploitée et particulièrement pour estimer les extrémités : DL05 et DL95. En plus, le nombre d’animaux sacrifiés pour une telle détermination doit être assez élevé, d’après Trévan, 30 animaux par dose constituent un minimum.

Méthode de BLISS (1938)

Afin de transformer la courbe de Trévan en une droite, le pourcentage de mortalité est remplacé par des unités appelées Probits et la dose par le Log (dose).

Les unités Probits correspondent à des écarts types réguliers constants autour de la moyenne, par exemple : +1, +2, +3, 0, -1,-2,-3. La moyenne elle-même étant fixée à 0. Pour éviter des nombres négatifs, les unités Probits sont obtenues en ajoutant une valeur de 5 à ces valeurs : Probits = écart type + 5.

Tableau 2.1. Probits et taux de réponse.

Écarts Probits Taux de réponse
-3 2 0,1
-2 3 2,3
-1 4 15,9
0 5 50,0
1 6 84,1
2 7 97,7
3 8 99,9
Figure 2.3. Courbe de Bliss
Figure 2.3. Courbe de Bliss

Inconvénients : Elle est longue, le tracé de la droite probable dite droite de régression entraîne des erreurs parfois notables, les limites de confiance de la DL50 sont très étroites.

Méthode de Miller et Tainter (1944)

La méthode d’évaluation de la toxicologie aiguë selon Miller et Tainter est pratique, simple et rapide, mais les valeurs de la DL50 ainsi obtenues ne sont que rapprochées.

La méthode consiste à porter sur un papier log-probits, les pourcentages (%) de mortalité (en Probits) en fonction du Log (dose). Comme les produits des 0 % et 100 % tendent vers l’infini, ceux-ci sont remplacés par des valeurs corrigées : Correction 0 % : y0 = 50/n. Correction 100 % : y100= (100 n – 50) /n. Avec n nombre d’animaux sacrifiés dans chacun de ces lots.

L’écart type de la DL50 : σ = (DL84% – DL16%)/ 2.

Méthode de Litchifield et Wilconxon

Il s’agit d’une méthode rapide et sensible. La vérification de la droite est faite à l’aide d’une table de données. Les limites de confiance sont larges.

Méthode de Kraber et de Behrens

Il s’agit d’une méthode d’approximation par calcul rapproché, la DL50 est donnée comme suit :

DL50= (DL100– AB) N

A : la différence entre 2 doses successives.

B : moyenne de mort entre 2 doses successives.

N : nombre moyen d’animaux par lot.

Inconvénient : manque de précision.

Intérêts et limites de la DL50

La détermination de DL50 est nécessaire dans le cadre légal, elle permet la classification des produits chimiques selon leurs toxicités :

Tableau 2.2. Classification des produits chimiques selon leurs toxicités.

Classes de toxicité : Échelle de Hodge et Sterner
DL50 orale (rat) Indice de toxicité
Jusqu’à 1 mg/kg 1 = extrêmement toxique
De 1 à 50 mg/kg 2 = hautement toxique
De 50 à 500 mg/kg 3 = modérément toxique
De 500 à 5 000 mg/kg 4 = légèrement toxique
De 5 000 à 15 000 mg/kg 5 = presque pas toxique
Plus de 15 000 mg/kg 6 = relativement inoffensif

La détermination de la DL50 permet aussi l’évaluation du danger en cas de surdosage. Elle permet aussi la programmation des études de toxicité subaiguë et chronique chez les animaux, et des essais thérapeutiques chez l’homme. Elle a également pour rôle de faciliter le contrôle de qualité des produits chimiques, de l’index thérapeutique ou de la marge de sécurité qui est une valeur représentant le rapport entre la dose létale 50 et la dose efficace 50 (DL50/DE50).

Applications de la DL50

En résumé, les applications de la DL50 sont :

  • Évaluation du danger en cas de surdosage.
  • Programmation des études de toxicité subaiguë et chronique chez les animaux.
  • Source d’information qui fournit une appréciation préliminaire sur la toxicité d’une substance chimique qui peut être influencée par : l’âge, le sexe, les facteurs liés à l’hôte et l’environnement et les variations dans la réponse chez différentes espèces animales et différentes souches.
  • Détermination de l’index thérapeutique.

Limites de la DL50

L’indice DL50 sert fréquemment pour exprimer le seuil de toxicité aiguë ainsi que pour classer et comparer les toxiques. Il a cependant une valeur très limitée, car il ne concerne que la mortalité et ne donne aucune information sur les mécanismes réactionnels en jeu et la nature des lésions causées. Il s’agit donc d’une appréciation grossière et préliminaire, qui peut être influencée par plusieurs facteurs tels l’espèce animale, le sexe, l’âge, le temps, etc.

Les essais locaux de toxicité aiguë

Test de Draize

Le test de Draize (1944) est un test d’irritation qui a pour but d’identifier les produits irritants qui, après application sur la peau d’un lapin ou après introduction dans le sac conjonctival de son œil engendre des réactions caractéristiques (rougeur, urticaire, nécrose) par réaction de l’iris, affection de la conjonctive (conjonctivite), ou une production de larmes.

L’évaluation se fait à l’aide d’une échelle de points comportant 5 degrés distincts : (1) non irritant (2) faiblement irritant (3) modérément irritant (4) fortement irritant (5) extrêmement irritant.

Inconvénients : la similitude entre la réponse de la peau humaine, et celle du lapin est loin d’être parfaite, surtout lorsque la peau a été préalablement scarifiée. Les essais interlaboratoires ont révélé une marge d’incertitude considérable vis-à-vis cette classification.

Limites des études expérimentales in vivo

On ne peut pas obtenir des valeurs de la DL50 avec une très grande précision. Il faut sacrifier un grand nombre d’animaux ce qui entre en conflit avec l’éthique. En plus, les résultats obtenus (effets toxiques) ne préjugent en rien ce qui pourrait être observé après l’administration de la substance en question chez l’homme.

Ces tests sont influencés par plusieurs facteurs tels que les facteurs de variabilité (espèce, sexe, âge, poids) et les facteurs liés aux conditions expérimentales (régime alimentaire, la température, conditions d’habitats).

Relation de transposition

La transposition est la détermination de la concentration équivalente en toxicité humaine « CETH » exprimée en mg/l de plasma à partir des données obtenues chez l’animal au cours des essais cliniques. Cette extrapolation reste approximative, car le sujet idéal pour des études relatives à l’homme ne peut être que l’homme lui-même.

Problèmes de transposition

La transposition des résultats obtenus de l’expérimentation animale à l’homme présente des obstacles, et ceci pour différentes raisons parmi lesquelles, la différence dans le système ADME entre l’homme et l’animal, par exemple, certains effets ne peuvent être mis en évidence chez l’animal tels que les céphalées, le vertige, les nausées, l’insomnie, la fatigue et les troubles psychiques.

Les alternatives aux tests de toxicité sur animaux (les études expérimentales in vitro)

Essais de Cytotoxicité in vitro

Les tests de culture de cellules humaines sont plus précis que la DL50 chez les animaux. Ils offrent une prédiction sur la toxicité chez les humains avec une précision de 90 %.

Les avantages des cultures de cellules humaines dans le cadre de prédiction de la toxicité

  • Elles sont d’origine humaine et donc permettent d’éviter les différences d’espèces.
  • Elles peuvent être prélevées à partir d’un tissu (peau, foie) susceptible d’être affecté par une substance particulière.
  • Elles permettent au chercheur d’étudier comment une substance endommage les cellules et donc de savoir pourquoi elle est toxique.
  • Elles permettent d’éviter de faire souffrir et de tuer des animaux.

Les alternatives aux tests d’irritabilité

Eytex ® : Ce test est destiné à mesurer l’irritation oculaire sur une protéine végétale. Le gel protéinique clair devient vitreux lorsqu’il est en contact avec une substance irritante.

L’épiderme humain reconstitué : Il s’agit de plusieurs couches de peau humaine cultivées au laboratoire que l’on peut utiliser pour les tests d’irritation cutanée.

Lignées cellulaires cornéennes.  Il s’agit d’une population homogène de cellules cornéennes, stables après des mitoses successives.

Les études théoriques : Des systèmes informatiques sont utilisés pour prévoir la propriété irritante des nouvelles substances sur la base de ce qui est déjà connu au sujet des substances irritantes ayant une structure chimique semblable.

Les études humaines : des volontaires humains sont engagés pour tester les nouvelles formulations. Ces études sont les plus fiables. L’évaluation de l’irritation chez les humains est faite grâce à un patch, les substances à tester sont placées sur des petites zones en haut du dos, le patch est appliqué pendant 2 jours.

Enquêtes épidémiologiques : L’enquête épidémiologique comporte la comparaison entre deux groupes d’individus (cohortes) aussi semblables que possible à l’exception du facteur à étudier (exposition à une substance chimique) par des approches statistiques pour pouvoir établir la relation cause – effet. La consultation des organismes de santé peut être bénéfique dans ce cadre.

Bibliographie

  • United Nations (2009). Système général harmonisé de classification et d’étiquetage des produits chimiques (SGH). United Nations Publications. pp. 119 —. ISBN 978-92-1-216509-7.
  • Jean-Marc Frémy; Patrick Lassus (2001). Toxines d’algues dans l’alimentation. Editions Quae. pp. 321 —. ISBN 978-2-84433-052-9.
  • Toxicité Aiguë » Analytical Toxicology. (2018, March 24). Page web : https://www.analyticaltoxicology.com/toxicite-aigue

 

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